
PME DE CROISSANCE:
AVEZ-VOUS L’EQUIPE DE DIRECTION QU’IL VOUS FAUT ?
Lorsqu’une PME à potentiel atteint une certaine taille, il vient toujours à l’esprit du dirigeant la question de la pérennité du modèle et de son évolution. Ce sujet devient naturellement plus critique ne serait-ce que par sa responsabilité croissante sur des enjeux économiques et humains plus importants. Peu de vrais entrepreneurs sont adeptes du « après-moi-le-déluge… »…
La croissance rentable n’est que la résultante d’une compétitivité durable et la course à la croissance ou aux coûts les plus bas ne crée pas les conditions de la pérennité.
La réussite d’aujourd’hui n’est que le résultat de ce qui a été fait… avant.
La pérennité de l’entreprise se joue donc sur sa capacité à travailler sans cesse ses forces et les porter sur des terrains bien choisis.
Réexaminer régulièrement « l’état du véhicule », remettre en cause les processus qui créent la valeur de l’offre, l’excellence commerciale et les coûts les plus justes, demande donc un investissement plus important du temps et de l’énergie du dirigeant.
Dans cette perspective son rôle doit impérativement évoluer. Il doit moins « porter » l’entreprise et être de plus en plus « porté » par elle pour prendre le recul nécessaire et mieux la piloter dans un monde incertain.
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Chefs de Service ou vrais Directeurs ?
Une condition incontournable de pérennité est donc l’existence d’une équipe solide autour du dirigeant, …et qui ne soit pas constituée uniquement d’exécutants. Un dirigeant dont l’équipe de direction a un niveau managérial trop faible reste collé à l’opérationnel et risque de conduire, le nez dans le guidon, son entreprise dans le mur.
Le rôle critique d’une vraie équipe de direction est triple :
Assurer l’exploitation, pour que le dirigeant puisse prendre le recul nécessaire à la préparation du futur.
Enrichir collectivement la réflexion du dirigeant, par des idées, des faits et des chiffres,
Relayer auprès des équipes l’exigence d’amélioration et d’exploration des axes de compétitivité.
Le Dirigeant n’est pas conduit pour autant à se couper du réel. La taille de la PME lui permet une proximité physique avec les divers acteurs du terrain. De plus, des dispositifs relativement simples de gouvernance sur les divers enjeux (revues, comités) le maintiennent au contact des problèmes. Il peut ainsi rester au fait de tout, poser les bonnes questions, arbitrer mais sans avoir à donner lui même réponses et solutions opérationnelles.
Responsables de fonctions ou Garants de compétitivité ?
Une première condition est que les directeurs doivent être positionnés (s’engager) comme « garants » de compétitivité dans les divers domaines fonctionnels de l’entreprise qui leur sont totalement délégués. Ainsi, le directeur Commercial, au-delà de ses résultats de vente, doit de plus prouver qu’il fait progresser l’arme du commercial dans la compétitivité de l’entreprise.
Si ces enjeux sont sur leurs épaules, ils ne sont donc plus sur celles du Dirigeant. A ce titre, les Directeurs sont donc non seulement responsables de l’efficacité opérationnelle des fonctions correspondantes, mais surtout force de proposition pour leur amélioration.
Le dirigeant pour sa part reste, au-delà de son rôle déterminant dans la prise de décision, la stratégie et la prise de risque, le seul garant
De la clarté et de la transparence
De la pertinence et de la permanence des valeurs de l’entreprise.
Du climat général
Du bon fonctionnement (cohérence et cohésion) de son équipe rapprochée.
De la cohérence à la cohésion du Comité de Direction
Même si des points de vue doivent s’affronter pour une plus grande richesse des idées, le minimum à établir est une certaine sérénité entre les membres du Comité de Direction sur leur légitimité à faire partie de l’équipe. Chacun doit être reconnu non seulement en tant que personne, mais aussi dans son domaine de compétence.
Ce préalable n’est pas toujours acquis, notamment lorsque d’autres critères que la compétence ont présidé aux nominations… Cela peut hypothéquer gravement l’efficacité de l’équipe (« évitement convivial », manque de transparence, etc.).
La cohérence de l’équipe de Direction commence par la mise en place des conditions de la clarté : des repères, des vocabulaires, des concepts-outils qui permettent de travailler efficacement les sujets concrets et les enjeux de l’entreprise.
Le mode de prise de décision doit être compris et accepté par tous. Qu’il soit autocratique, consensuel, démocratique, rapide ou lent, nourri d’information ou plus intuitif, simple ou complexe, il faut surtout qu’il soit adapté à la situation de l’entreprise dans un environnement de moins en moins prévisible.
La cohésion ne peut pas se créer seulement par le partage des idées et par l’efficacité intellectuelle des débats autour de la vision de ce que pourrait devenir l’entreprise …si elle existe encore dans 5,10,20 ans…
La cohésion de l’équipe de Direction se construit essentiellement à travers le vécu d’émotions, du fait d’une remise en cause des comportements, accompagnée d’une réflexion partagée sur les valeurs communes.
Quand le changement est nécessaire…
Si l’entreprise a réussi, jusque là, c’est qu’elle a développé des habitudes, des processus qui, s’ils ont été bénéfiques, garantissent rarement la pérennité du modèle dans un monde qui se transforme considérablement. Pire, de nombreux germes d’échec futur résident souvent dans les causes mêmes du succès d’aujourd’hui.
La volonté du dirigeant d’impulser une dynamique nouvelle doit donc changer la mobilisation et les rapports au sein du Comité de Direction.
De nouveaux objectifs de compétitivité vont toucher chacun des membres de l’équipe de Direction. Une nouvelle cohésion devra se construire, pas seulement sur les idées, mais sur l’exercice même de l’engagement et de l’exigence.
Le Comité de Direction ne fait donc pas que s’équiper avec de nouveaux objectifs, concepts et outils qu’il portera vers le management intermédiaire, il va aussi se transformer.
Sans pour autant modifier son style, le Dirigeant, devient plus exigeant sur la prise de décision, sur le suivi et sur la façon dont les Directeurs s’assument comme garants.
Les Directeurs vivent cette évolution plus ou moins confortablement selon leur profil. Ils perçoivent que leur position dans l’équipe est déstabilisée, de même que leurs relations bilatérales, notamment avec le dirigeant.
Quelques points importants auxquels il faut veiller :
Si chacun doit se sentir challengé, il ne doit pas se vivre comme « menacé ». La confiance du patron leur est toujours accordée, même si la situation est moins confortable qu’avant.
La collégialité du Comité de Direction est un gage de pérennité. Quel que soit le style du dirigeant et le type de prise de décision, l’augmentation de l’exigence ne le transforme pas en autocrate…
Dans la PME et quel que soit le style du dirigeant, le Comité de Direction est souvent vu par le management intermédiaire comme l’organe (plus ou moins collégial) du dirigeant. Trop souvent, les Directeurs se comportent et sont perçus comme de simples porte-paroles chargés de faire appliquer les décisions.
Or, les Directeurs doivent devenir porteurs individuels et collectifs du projet de changement : leur partage de la stratégie, leur transmission des valeurs (compétitivité, engagement, exigence) sont des conditions impératives pour garantir l’avenir du modèle de réussite.
Le Comité de Direction devra donc travailler de manière critique sur lui-même…
Dans les grands groupes internationaux les acteurs restent souvent des individus liés par un contrat de travail, des transactions et des compromis.
Dans la PME il est vital que l’équipe de Direction soit constituée de personnes qui s’épanouissent dans une vision commune dont elles sont toutes porteuses….
François Dert
Février 2014